La crise de l’aéronautique met la pression sur de nombreux secteurs

La crise du coronavirus a eu et continue d'avoir un impact énorme sur le secteur de l'aviation. Il n’y a pas que les pilotes ou le personnel d'enregistrement qui sont affectés, les agents de sécurité, le personnel des agences de voyage, des boutiques et de l'Horeca de l'aéroport, les bagagistes et le personnel de nettoyage sont également touchés. Tout comme les travailleurs du pétrole, du caoutchouc (chimie) et du métal qui subissent également de plein fouet les effets de cette crise. Si nous voulons éviter les licenciements, nos secteurs ont absolument besoin de soutien, déclarent nos délégués. 

Les chiffres récemment publiés par le service de médiation fédéral pour les aéroports sont éloquents : à partir de mars 2020, le nombre de vols pendant la journée a diminué de plus de 40 %. En avril, le point le plus bas a été atteint avec une baisse de plus de 80 %. En juillet et août, la baisse s'est maintenue autour de 60 %, pour ensuite remonter vers les 70 %.  Il faut préciser que la situation du secteur aérien varie fortement selon les régions du pays et également selon le type de transport réalisé (transport de passagers ou de marchandises). Si l’aéroport de Liège fonctionne actuellement à plein régime, ce n’est par exemple pas le cas de Bruxelles de Charleroi, où les difficultés économiques se font durement sentir et où les perspectives d’avenir semblent compliquées.

Mesures corona

Il ne faut pas perdre de vue qu'il s'agit d'un secteur très important dans notre pays : construction aéronautique, service aux aéroports, transport de personnes et de marchandises, caoutchouc, pétrole, ... La liste est longue, tout comme la liste de préoccupations des travailleurs : chômage temporaire massif, perte de revenus, perte d'emplois, manque de perspectives,… 

En premier lieu, il y a la perte de revenus. "Nous sommes un secteur durement touché, nous pouvons donc encore bénéficier du chômage temporaire de 70 % pour cause de force majeure corona, mais ça reste difficile pour beaucoup de gens", explique Karine (gardiennage). Outre le chômage technique, il y a aussi la suppression de primes qui étaient liées à de nombreux postes. Pour de nombreux travailleurs, cela signifie une perte considérable de salaire, ajoute Bjorn (cargo).

Encore jusqu’en 2022

L'objectif est clair : éviter les licenciements, faire en sorte que tout le monde puisse rester à bord... ‘Actuellement nos emplois sont en danger, malgré toutes ces années de croissance’, explique Giovanni. ‘Nous avons besoin de mesures qui empêchent les fermetures et les délocalisations’.

En fait, il s'agit d'un secteur en plein essor qui n'a cessé de croître ces dernières années et qui le fera encore à l'avenir. Il faut simplement traverser cette période. Et cette période peut encore durer un certain temps. Lorsque tout redémarrera, le volume de travail ne sera pas immédiatement de 100 %. Plusieurs secteurs prévoient que le chômage temporaire se poursuivra jusqu'à la fin de l’année 2021, voire jusqu’en 2022.

Un « plan aviation » de toute urgence

Les différentes centrales de la FGTB concernées unissent leurs forces et appellent les responsables politiques à agir. Un "plan aviation" doit permettre au secteur de faire face à cette « tempête sanitaire ». Les objectifs sont multiples : maintenir l'emploi et le savoir-faire, et maintenir ce secteur dans notre pays. En outre, nous attendons également des responsables politiques qu'ils répondent aux besoins urgents et concrets, tels que l'extension du régime de chômage temporaire, faciliter l’accès aux RCC (anciennes prépensions) et l'introduction à grande échelle d’une réduction collective du temps de travail. Mais ce plan aviation ne peut pas être financé sur le dos de la collectivité. 

Giovanni Sacco - Technical Airborne Components Industries (Métal)

« Avant l’arrivée du covid-19, l’ère de l’industrie 4.0 faisait déjà craindre pour l’emploi. Depuis des années, les bénéfices sont considérables ! Avec le covid, TAC n’a pas vu son retour sur investissement se crasher mais plutôt perdre de l’altitude passant de 20 à 9%. Motif ? La crise sanitaire et ils délocalisent aux USA ! Cette situation est aberrante face aux nombreuses années de croissance ! Passer le cap ? Nous en étions capables ici en Belgique ! Des crises nous en avons passées ! Des mesures sur les fermetures et délocalisations purement financières sont nécessaires » !

Bjorn – Swissport cargo (SETCa)
 
En raison de la réduction du nombre de vols passagers, le chargement et le déchargement sont aux aussi en chute libre. Dans le même temps, nous recevons plusieurs fois par semaine des vols passagers qui ont même de la cargaison chargée sur les sièges. Ce qui signifie que 10 à 15 personnes doivent se tenir les unes à côté des autres dans l'avion pour amener toute cette cargaison à la porte, pièce par pièce, ce qui n'était pas concevable avant le coronavirus. En réalité, nous n'avons généralement que 5 à 7 personnes disponibles. 
 
Au début, les gens étaient appelés à travailler au pied levé, mais en tant que syndicat, nous avons pu y mettre un terme. Nos opérationnels doivent sans cesse être plus flexibles. Par exemple, les personnes qui font du travail de bureau sont appelées à décharger les avions ou à préparer les palettes d'avions. Si vous posez des questions à ce sujet, la réponse est que l'entreprise connaît des difficultés et que ces travailleurs doivent accepter un autre travail s'ils ne veulent pas être placé au chômage technique. 

Benny -  Skytanking (Centrale Générale – FGTB / pétrole) 

Chez Skytanking (carburant aéroport de Zaventem), nous travaillons environ 11 jours par mois, le reste, c’est du chômage technique. Au début, 5 contrats n'ont pas été renouvelés, mais sinon il n'y a pas eu de licenciements. 

Financièrement, c’est difficile, mais nous savons tous que c'est la seule façon pour chacun de rester en place, nous restons donc solidaires. 

Quand tout redémarrera, il faudra encore quelques années avant que tout ne revienne à 100 %. Il y a donc des incertitudes.  

En tant que syndicat, nous restons très vigilants, nous veillons à recevoir chaque mois les informations nécessaires afin de pouvoir réagir rapidement. Notre objectif est de garder tout le monde à bord.

Karine – G4S (Centrale Générale – FGTB / gardiennage)

Nous sommes au chômage temporaire depuis mars et à l’heure actuelle, tout le monde travaille 3 à 4 jours par mois. Les gens ont vraiment peur. Sur notre fiche de salaire mensuelle, la perte semble encore acceptable, mais trop peu d'impôts sont prélevés, nous devrons donc rembourser plus tard... De plus, notre prime de fin d'année ne sera pas assimilée. À la fin du mois, nos téléphones ne cessent de sonner. Beaucoup de gens rencontrent des problèmes.

Nous voulons avant tout sauver les emplois. Mais nous voulons aussi que tout soit prêt lorsque tout reprendra. Mais nous nous sentons assez impuissants.  Nous avançons mois par mois. Nombreux sont ceux qui recherchent des flexi-jobs ou une activité d’indépendant, ou qui quittent complètement le secteur. 

Pascale - BSCA Charleroi Airport (SETCa)

« Avec le Covid, nous sommes passés à une autre réalité. Notre société était en plein essor, nous battions des records en termes de ponctualité, en nombre de passagers… Et puis, il y a un an, tout s’est arrêté brutalement. Depuis, les travailleurs vivent sous oxygène. Nous avons d’abord enchaîné trois mois d’arrêt complet et de chômage économique, ce qui a été très dur sur le plan financier mais aussi humain.

Avec la reprise des voyages en juin dernier, nous avons espéré pouvoir progresser vers un mieux. Mais les restrictions imposées (en termes de destinations, de critères de départs essentiels) et l’évolution instable de la situation sanitaire rendent les choses difficiles au quotidien. Nous continuons tous à jongler avec des journées de chômage économique et de travail. La direction assure qu’elle met tout en œuvre pour limiter l’impact social mais nous savons que les choses vont mal. J’ai peur pour l’avenir ».