Rarissime : un nouveau syndicat voit le jour aux USA !

C’est une petite révolution dans le monde du travail aux Etats-Unis : la création d’un syndicat par des travailleurs de Google. C’est d’ailleurs une grande première dans la Silicon Valley, région où se concentrent de nombreuses entreprises de haute technologie et où les salaires sont généralement élevés. Un mouvement qui pourrait inspirer d’autres travailleurs de ce pays ultra-libéral, comme ce fut le cas pour la lutte « Fight for $15 ».

C’est un euphémisme que de dire que les travailleurs américains ont peu l’occasion de s’exprimer, de défendre leurs droits devant les grands patrons de cette économie ultra-libérale. Alors, quand les travailleurs d’une multinationale s’unissent pour former un syndicat et s’opposer aux mesures asociales de la direction, nous ne pouvons qu’applaudir des deux mains. 

Le conflit entre les travailleurs de Google et leur direction ne date pas d’hier. En 2018 déjà, certains travailleurs avaient lancé une pétition visant à s’opposer à la participation de Google à un programme de recherche du Pentagone. Par la suite, des travailleurs ont protesté suite aux importantes indemnités versées à des dirigeants alors qu’ils étaient accusés de harcèlement sexuel. Mais c’est le licenciement de Timnit Gebru, une chercheuse noire qui reprochait à Google de ne pas être assez inclusif avec les personnes issues de la minorité qui a fait déborder le vase. 

Le syndicat qui a vu le jour au sein de l’entreprise est composé de 200 à 300 travailleurs. C’est une minorité de travailleurs mais ensemble, ils ont décidé de former un syndicat minoritaire qui parle en leur nom. Ils vont ainsi tenter de faire pression sur leurs dirigeants, en agissant collectivement. 

Un système pour casser la création de syndicat

Un syndicat minoritaire est possible aux Etats-Unis mais n’est pas légalement reconnu. Google ne reconnaît d’ailleurs pas ce syndicat et n’a aucune obligation de négocier avec eux. Nous tirons donc notre chapeau à ces travailleurs qui n’hésitent pas à se placer dans une situation précaire pour tenter de faire bouger les choses.

« C’est un grand pas en avant pour le mouvement syndical américain » déclare Nicholas Allen, du syndicat SEIU qui représente les intérêts des employés du secteur des services dans le pays, et bien connu pour sa contribution à la lutte pour un salaire minimum aux Etats-Unis « Fight for $15 ».

« Aux Etats-Unis, le système est construit pour rendre la création d’un syndicat extrêmement compliqué au sein d’une entreprise. Pour qu’un syndicat soit reconnu, il doit gagner une élection et obtenir le soutien d’une majorité de tous les salariés. Et pendant le processus de cette élection, l’employeur a quasiment le droit de tout faire pour décourager les travailleurs à se syndiquer. Le processus est très long, très coûteux et il est donc très difficile pour les travailleurs de parvenir à être représentés collectivement. »

Le syndicalisme américain à un tournant

Aujourd’hui, aux Etats-Unis, 6% des travailleurs des entreprises privées sont syndiqués alors qu’ils étaient 35% dans les années 50. Un déclin qui s’explique par une campagne agressive de la droite américaine qui s’acharne à détruire le mouvement syndical. Mais malgré cette situation, Nicholas Allen reste optimiste : 

« Sur le terrain, nous sommes capables de mobiliser des millions de personnes, nous participons activement aux élections politiques, ça nous donne un certain poids avec le Parti démocrate par exemple. Les inégalités sociales et économiques pèsent de plus en plus sur les travailleurs américains. Ils doivent réagir et se mobiliser. Nous sommes à un tournant car de nombreux travailleurs veulent se syndiquer et ainsi s’unir pour négocier de meilleures conditions. Le système légal pose toutefois problème. Nous verrons dans les années qui viennent comment les choses vont évoluer. Tout dépendra aussi de la position qui sera adoptée par l’administration de Joe Biden vis-à-vis du syndicalisme et du système économique. »