Pérou - Après les espoirs, les travailleurs péruviens déchantent
En 2011, fort d’un soutien populaire important, Ollanta Humala devient Président du Pérou. Cette élection laisse présager un tournant dans la politique de ce pays tristement réputé pour ses atteintes aux droits des travailleurs. Deux années plus tard, force est de constater que rien n’a changé, l’état reste fidèle à sa politique antisyndicale. C’est dans un contexte menaçant et difficile que la Centrale Générale apporte son soutien au FTCCP, le syndicat de la construction civile, dans la formation de ses nouveaux cadres syndicaux.
Alors que le peuple péruvien voyait de nouvelles perspectives se dessiner pour son pays suite à l’élection d’Ollanta Humala comme Président en 2011, aujourd’hui, c’est la désillusion. Humala avait pourtant reçu l’appui et les votes de la CGTP, la confédération générale des travailleurs du Pérou, mais malgré les compromis électoraux, il poursuit dans la lignée de ses prédécesseurs avec une politique antisyndicale caractérisée. Les atteintes envers les droits des travailleurs sont récurrentes, de plus en plus de dirigeants syndicaux sont arrêtés et emprisonnés. Depuis ce début d’année, on dénombre jusqu’à 3000 licenciements dans différents secteurs professionnels simplement parce que les travailleurs s’étaient affiliés à un syndicat.
Les patrons favorisés
Une nouvelle loi résume à elle seule la politique antisyndicale du gouvernement péruvien. En effet, cette loi offre la possibilité aux employeurs qui occupent moins de 50 travailleurs de leur donner un autre « régime de travail ». Cette loi leur permet en outre de n’octroyer que la moitié des vacances, de ne pas payer de 13e mois ou la sécurité sociale. Les syndicats et les travailleurs se sentent trahis et l’ont fait savoir le 17 juillet dernier lors d’une rencontre avec le président péruvien. Si Ollanta Humala ne change pas son fusil d’épaule, ils n’hésiteront pas à radicaliser les moyens de lutte pour une société plus juste et égalitaire.
La mobilisation porte ses fruits
La force de mobilisation des travailleurs ne doit pas être sous-estimée. Le 4 avril dernier, la journée nationale de lutte organisée par la CGTP réunissait 180.000 travailleurs à travers le pays, dont de nombreux militants de la FTCCP, le syndicat de la construction civile avec lequel nous collaborons. La FTCCP revendiquait un plus grand investissement public pour les chantiers d’infrastructure en vue de créer des postes de travail, le rejet de la violence sur les chantiers de la construction civile et une solution pour le cahier de revendications 2013-2014.
Pour ce dernier point, un accord a été obtenu avec des avancées significatives en termes de salaires et de conditions de travail. Une victoire pour ce secteur syndicalement fort mais il faut maintenant faire appliquer cet accord sur le terrain, ce qui est loin d’être simple selon Luis Villanueva, secrétaire exécutif de la FTCCP : « Seul 30% des travailleurs peuvent bénéficier de tous les droits sociaux auxquels ils ont droit en théorie. Près de 70% d’entre eux ne perçoivent pas les bénéfices envisagés dans les accords collectifs car ils n’ont pas la possibilité de s’affilier à un syndicat étant donné qu’ils travaillent pour des entreprises qui comptent moins de 20 travailleurs qui est la barre à franchir pour créer un syndicat dans le secteur privé ».
Renforcer le syndicat par la formation avec la CG
Dans ce contexte politique menaçant et difficile, la FTCCP met tout en œuvre pour renforcer son syndicat et ses dirigeants afin d’aboutir à une meilleure défense des travailleurs. Ce renforcement passe par la formation de ses nouveaux cadres syndicaux. Projet auquel collabore la Centrale Générale de la FGTB pour la période 2012-2014. Ces formations ont pour objectif de renforcer la capacité des syndicats de la construction à présenter leurs revendications et à négocier et leur apporte les outils de communication, juridiques ou économiques pour être mieux armés afin de défendre les travailleurs. Ce projet a également pour but d’encourager la participation des femmes dans les instances syndicales via un quota de femmes à respecter lors de chaque formation.
Des résultats de ce projet se font déjà ressentir. De par l’amélioration des compétences et de ses services, la FTCCP a connu une croissance de 11,76% d’affiliés en 2012 pour porter le nombre à 96.000 affiliés. Mais sachant que le syndicat péruvien représente 300.000 travailleurs de la construction, il reste encore du chemin à parcourir.