Le travail faisable, un des défis majeurs de l’industrie du textile

Début décembre, quelque 100 travailleurs de l’industrie du textile se sont réunis à l’occasion du congrès professionnel de la FGTB Textile. Les militants ont saisi l’occasion pour partager des idées enrichissantes sur les deux thèmes principaux, à savoir ‘le travail faisable’ et ‘l’avenir de l’industrie textile.’ Rétrospective de ces deux journées intéressantes et enrichissantes. 

Le travail faisable dans le textile 

Le stress au travail, la motivation, les opportunités d’apprentissage et l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée ont un impact sur la faisabilité d’un emploi. En outre, des indicateurs de risque tels que la charge du travail, la variation des tâches et la charge physique peuvent également avoir un effet. Nos délégués sont sur la même longueur d’onde lorsque la thématique du travail faisable est abordée :

PatriciaSelon moi, la sécurité et le respect sont les deux choses les plus importantes lorsqu’il s’agit du travail faisable. D’une part, un système doit être mis en place pour que vous et vos collègues ne soyez jamais en danger lorsque vous travaillez et d’autre part, nous devons travailler ensemble. Je ne veux pas dire que nous devons travailler pour notre employeur, mais avec lui, comme une équipe. Nous constatons de petites évolutions dans notre entreprise, mais nous n’en sommes toujours qu’au premier stade. Au niveau de l’ergonomie, la situation n’est pas encore optimale. Pour les problèmes de dos, par exemple, on nous a montré une vidéo qui nous expliquait comment nous étirer. On nous respecte peu et nous sommes encore trop souvent considérés comme des ‘petites mains’. Nos employeurs bénéficient bien de formations, pour améliorer les choses, mais ils ont vraiment du mal à franchir le pas. – Patricia 

 

Patrick

Le travail faisable signifie également que les travailleurs âgés arrivent à gérer le travail, que le travail est d’un niveau qui leur permet encore de prester. Une charge de travail moins importante et moins de pression sur les tendons et le dos en font également partie. Le fait de soulever des charges et de répéter les mêmes mouvements pendant des années provoque des inflammations. Heureusement, les choses s’améliorent. Avant, les rouleaux étaient par exemple déposés manuellement dans les bacs, aujourd’hui, ils sont envoyés au dépôt par une machine. Et nous continuons d’amener ces questions au CPPT, pour qu’elles soient traitées. Nos collègues sont extrêmement reconnaissants ! Il n’est cependant pas possible de tout remplacer au sein de notre secteur. Les bobines d’environ 9 kg, par exemple, sont encore remplacées manuellement, ce qui est assez lourd. – Patrick  

 

Stephanie

 

Le travail faisable, c’est un travail adapté au travailleur, un travail conçu de manière ergonomique pour qu’ils se sentent à l’aise. Mon poste de travail a été modernisé il y a une dizaine d’années. Les machines ont été adaptées sur le plan ergonomique. La hauteur des machines a été ajustée, de sorte qu’il faut moins se baisser, par exemple. – Stephanie 

 

FakhirLe travail faisable est synonyme de respect pour les travailleurs. Ce qui passe par un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée mais aussi par une amélioration de l’ergonomie. Pour nos collègues employés, je pense par exemple à une bonne chaise de bureau et à des écrans adéquats. Pour les ouvriers, il faut réduire les charges et les machines doivent être ajustées en hauteur. Dans mon entreprise, des formations sont également prévues sur ‘comment interagir avec les gens’ ainsi que des cours en matière de sécurité. Lorsque nous constatons quelque chose qui n’est pas acceptable, nous le signalons au CPPT pour que cela soit réglé. – Fakhir 

 

 

A person in a striped shirt

Description automatically generatedLisa, du service d’études de la Centrale Générale, affirme que les risques musculosquelettiques et l’ergonomie font partie de la qualité de l’emploi et ont un impact sur la faisabilité du travail. “Les mouvements répétitifs et le travail physiquement contraignant augmentent le risque de troubles musculosquelettiques (TMS), pouvant conduire à une incapacité de travail. (voir la vidéo du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale ). Selon une enquête, jusqu’à 80% des travailleurs ont déjà souffert d’un trouble musculosquelettique. L’ergonomie mérite donc notre attention et il est nécessaire de travailler sur la prévention des TMS. Nous avons développé deux outils (un baromètre TMS et un bodymap TMS)  afin de soutenir nos délégués lorsqu’ils discutent de cette thématique dans leurs entreprises. D’autres outils intéressants peuvent également être trouvés sur www.beswic.be et www.preventiondestms.be.”

 
Quel futur pour l’industrie textile ?

L’industrie textile est sous pression en Belgique. Le secteur fait face à l’automatisation, la globalisation et la délocalisation. Mais il est également impacté par la concurrence internationale, la hausse des coûts de production ou encore la modification du comportement des consommateurs. Les entreprises sont confrontées à des fermetures, des faillites et des restructurations, ce qui entraîne des pertes d’emploi.

FilipLes informations précitées sont correctes, mais toutes les entreprises du secteur ne se portent pas mal pour autant. Depuis des années, on supprime déjà des postes d’emploi dans l’industrie du textile. Le travail évolue, certaines fonctions à forte intensité de main-d’œuvre sont ainsi entièrement automatisées. Et malgré toutes les difficultés, les entreprises textiles continuent à investir dans de nouvelles techniques et de nouveaux produits, créant ainsi de nouveaux emplois,” explique Filip, économiste de la Centrale Générale. 

Fakhir confirme que les choses n’ont pas été faciles dans le secteur en raison de la guerre en Ukraine et des crises successives. Dans son entreprise, l’accent est surtout placé sur l’innovation au niveau qualitatif et écologique. Patrick acquiesce et ajoute que la concurrence est de plus en plus forte et qu’il faut donc investir davantage dans la qualité ! Dans l’entreprise de Stéphanie également, l’innovation est un élément central : une nouvelle station d’évaporation chimique est en cours d’installation, on envisage de recycler des vêtements d’hôpital et les vêtements de l’armée y sont recouverts d’un revêtement antimoustique. Alors que les trois entreprises de nos délégués investissent et innovent, l’avenir de l’entreprise de Patricia est menacé. L’entreprise en est déjà à sa troisième vague de licenciements et un site a déjà fermé ses portes. Il n’y a pas d’innovation, sauf sur le plan informatique… Ce qui a cependant changé, c’est la vitesse à laquelle il faut produire. On peut accepter d’augmenter les cadences, mais il faut veiller à ce que les travailleurs ne soient pas en danger ! 

A person with blonde hair wearing glasses and a black jacket

Description automatically generatedMalgré la situation des entreprises comme celle de Patricia, l’industrie textile en Belgique a un avenir. Les défis sont importants, mais nous devons investir dans l’innovation et la durabilité et nous devons nous concentrer sur des produits de haute qualité et spécialisés. C’est la seule façon de relancer notre industrie textile et de maintenir notre position concurrentielle sur le marché mondial. “En tant que FGTB Textile, nous continuerons à protéger nos travailleurs, à promouvoir la justice sociale et à encourager un avenir durable pour le secteur. Par le biais d’une étroite coopération avec les gouvernements, les entreprises et les travailleurs, nous pouvons, en tant que syndicat, contribuer à une transformation juste qui maintient la résilience économique et l’emploi et permet aux travailleurs de pouvoir compter sur une sécurité d’emploi et des conditions de travail décentes, » a déclaré Annelies Deman, secrétaire fédérale en charge du secteur.  

 

 

textiel
Nos délégués au congrès professionnel FGTB Textile le 2 et 3 décembre