Nettoyage dans les hôtels - Des humains, pas des robots !

Les travailleurs du secteur du nettoyage dans les hôtels font partie de la catégorie salariale la plus basse. Une véritable injustice au regard des exigences et de la pénibilité du travail.

Imaginez la scène : vous passez un week-end idyllique à Bruxelles ou dans n’importe quelle autre ville. Après avoir arpenté la ville dans tous les sens, quel bonheur le soir venu d’arriver dans une chambre d’hôtel soignée, avec ses draps frais et une odeur de propre. Normal direz-vous... Normal, oui, mais avez-vous déjà pensé aux travailleuses et travailleurs grâce à qui ce moment de confort suprême est possible ? Nous avons rencontré pour vous 4 travailleurs du secteur du nettoyage dans les hôtels. Ils s’appellent Luisa, Sylvie, Lissette et Omar, ils viennent des quatre coins du monde et faire en sorte que vos chambres d’hôtel soient parfaites, c’est leur fierté.

Le secteur du nettoyage dans son ensemble souffre de deux grands maux : l’un économique, la concurrence déloyale et l’autre touche la santé des travailleuses et des travailleurs qui sont fréquemment victimes de troubles musculo-squelettiques, aussi appelés les TMS. Il s’agit d’affections qui touchent les tissus mous comme les muscles, les tendons, les cartilages, les nerfs et les vaisseaux. Outre ces problèmes communs, le secteur du nettoyage dans les hôtels est confronté à des difficultés spécifiques.

Et le nettoyage dans les hôtels ?

Pour les travailleurs du secteur du nettoyage dans les hôtels, s’ajoute une autre injustice: celle d’être dans la catégorie salariale la plus basse du secteur et ce, de manière injustifiée si on tient compte des exigences et de la pénibilité du travail. Mais vu le contexte, les employeurs excluent toute possibilité de rectifier les choses. En outre, on constate que le secteur est majoritairement représenté par des femmes, souvent seules avec enfants. On observe d’ailleurs une proportion importante de travailleurs du secteur vivant sous le seuil de pauvreté, en particulier à Bruxelles.

A la pièce ou à l’heure ?

On constate aussi dans le secteur que les employeurs préfèrent payer les travailleurs à la pièce, c’est-à-dire à la chambre, plutôt qu’à l’heure. Pour Dominique Fervaille, permanente pour la Centrale Générale-FGTB Bruxelles, il faut souvent commencer par se battre pour que les travailleuses soient payées à l’heure et non pas à la chambre. Une différence de taille. Ainsi, si on estime qu’il faut 15 minutes pour nettoyer une chambre et que la chambre est en bazar, c’est le travailleur qui sera lésé. Les cadences constituent vraiment le nerf de la guerre. Aujourd’hui, quand des négociations pour un nouveau contrat se font, on parle littéralement de négociations à la minute par chambre.

Pour Luisa, Cubaine installée en Belgique depuis près de 20 ans, c’est honteux. « On fait le calcul en fonction d’un robot, pas d’un humain. Nous sommes toujours pressées par le temps. La productivité est le véritable mot d’ordre. En tant que superviseuse, on me demande de contrôler une chambre en 3 minutes et de la rectifier si nécessaire. C’est quasi impossible ».

Des débuts difficiles

C’est avec beaucoup d’amusement que Sylvie, 38 ans, mère de 5 enfants nous raconte ses débuts dans le secteur: « Je suis venue de Côte d’Ivoire en 2003. Je touchais le CPAS et c’était une situation difficile à vivre, j’avais l’impression de quémander. Je voulais absolument trouver du travail, mais ce n’était pas facile. Un jour, une connaissance m’a parlé d’un boulot, mais en me précisant que ce serait dur et j’ai foncé. La première fois, j’ai dû laver 12 chambres avec un contrat de deux heures ! J’ai commencé à 8h00 du matin et à 18h00, je n’avais toujours pas fini… heureusement, par la suite, les choses se sont arrangées ».
Omar, le seul homme de la bande nous explique que pour lui aussi, les début ont été difficiles : « Pour vraiment connaitre le métier, il faut au moins six mois. En plus, comme on travaille dans des hôtels de luxe, vous imaginez l’épaisseur des matelas et les exigences au niveau du travail. Les tendinites et les maux de dos sont très fréquents chez nous. Le vrai problème des cadences, c’est qu’elles ne tiennent pas compte du fait que nous ne sommes que des humains, nous ne sommes pas tous les jours à 100% de notre forme, et pour ça, il n’y a pas de place ».

C’est là qu’intervient Lissette, la jeune équatorienne âgée de 25 ans est formatrice. Son poste a été créé à la suite d’une revendication syndicale. Evidemment, le patron profite des formations pour apprendre aux travailleuses des méthodes qui augmentent la rentabilité, mais d’un autre côté, ces formations permettent aussi aux travailleurs d’utiliser les bonnes méthodes qui les ménageront au maximum. Lissette nous explique : « Parfois, on a des gens qui nettoient comme à la maison, ils font des choses pour lesquelles ils ne sont même pas payés. Certaines viennent même avec leurs propres produits. Parfois, elles ont du mal à accepter qu’en changeant leur méthode, non seulement elles iront plus vite, mais en plus, elles se faciliteront la vie. J’interviens aussi quand il y a une reprise de chantier pour montrer aux nouveaux comment travailler pour diminuer la charge et utiliser correctement les produits. A côté de cet aspect, je leur montre aussi comment lire leur fiche de paie. C’est très utile ».

Un secteur fragilisé

Aujourd’hui, le secteur est confronté à un problème de plus : le chômage économique. Pour certains travailleurs, cela représente jusqu’à 15 jours par mois. Du jamais vu qui s’explique par la menace terroriste et la baisse de fréquentation des hôtels bruxellois.

Dominique résume de manière ironique et très juste le travail dans le secteur du nettoyage : «Le secteur du nettoyage, c’est une méthode et beaucoup d’huile de bras ». Parions que la prochaine fois que vous séjournerez à l’hôtel, vous aurez une attention particulière pour ces petites fées.

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Luisa, Omar, Dominique et Lissette. Faire en sorte que les chambres d’hôtel soient propres en un temps record, c’est le challenge qu’ils doivent relever chaque jour.