Le personnel d’entretien des hôpitaux : “On ne représente rien”

Le personnel du nettoyage des hôpitaux est essentiel. C'est ce que le gouvernement martèle depuis des mois. Malheureusement, ces belles paroles ne se traduisent pas dans la pratique. En effet, alors que tout le personnel hospitalier bénéficie - à juste titre - d'une prime d'encouragement de 985 euros, le personnel de nettoyage occupé via la sous-traitance n’y a pas droit. Une injustice flagrante que nous n’acceptons pas. Les travailleurs que nous avons interrogés subissent cette différence de traitement comme une gifle.  Faire le même travail que ses collègues mais être traité différemment, vous trouvez ça normal ? Eux non plus ! 

Depuis le début de la crise, nous devons tout désinfecter parfaitement, et ce, tout en assurant la propreté de l'hôpital, en plus du travail que nous deviens déjà à exécuter. Nous, et tous les autres collègues, avons tout donné depuis le début de la pandémie, y compris la nuit et le week-end. Le personnel de l'hôpital reçoit des avantages, mais nous, à part des remerciements de temps en temps, nous sommes toujours laissés de côté car nous ne faisons pas "partie de l'équipe". Notre employeur nous a donné - selon le lieu de travail et les heures prestées - un chèque unique et une boîte de chocolats. Nous n'avons pas tous reçu le même montant... et certains n'ont même rien reçu du tout. Mon sentiment maintenant que je sais qu'il n'y aura pas non plus de prime d'encouragement pour le personnel du nettoyage? Je suis déçue et je me sens méprisée. C'est injuste car en tant que travailleurs de première ligne, nous avons également travaillé beaucoup plus dur et de manière plus flexible. Nous sommes tout aussi méritants que nos collègues". - Mireille

"Au début de la pandémie, la situation à l'hôpital était très mauvaise : d'une part, nous ne savions pas à quoi nous devions faire face et, d'autre part, nous devions effectuer beaucoup plus d'heures et être plus flexibles. De nombreux collègues sont tombés malades et d'autres ont eu peur de travailler. Je suis donc intervenu là où je pouvais et j'ai nettoyé/désinfecté les pièces où se trouvaient des patients atteints du COVID, entre autres. Aujourd'hui encore, nous travaillons dur et nous faisons de notre mieux. C'est la raison de ma colère lorsque j'entends dire que nous n'avons pas droit à cette prime. Mes collègues se demandent si nous sommes assez importants, ce que nous valons, car personne ne se soucie de nous. Nous nous sentons invisibles et pas appréciés. Certains de mes collègues disent même "nous ne valons rien", et je trouve cela très triste. C'est frustrant de travailler si dur et de ne pas avoir droit à la récompense financière à laquelle nos collègues de l'hôpital ont droit, alors que nous faisons la même chose." - Marlen  

"Bien que nous disposions de tous les équipements de protection nécessaires au travail, je me rends toujours au travail la peur au ventre. J'ai déjà eu la corona et je sais quel effet ça a eu sur moi. C'est pourquoi je ne veux surtout pas que mes proches soient infectés. Au travail, la qualité est toujours au rendez-vous et, depuis la pandémie, nous travaillons encore plus dur que d'habitude, tout comme nos collègues de l'hôpital. Et pourtant, nous n'avons pas droit à la prime d'encouragement. C'est injuste. Mon mari travaille dans le secteur de la restauration et est temporairement au chômage depuis un certain temps. Nous avons vu nos revenus baisser, alors bien sûr, cette allocation serait la bienvenue." - Irena 

« Nous n’étions pas préparés à affronter une telle situation, or nous étions en première ligne face au virus. On a travaillé sur base de notre ancienneté mais on a vraiment pris des risques. Pourtant, on a jamais rien lâché, on a donné, on a stressé…. On avait pas de matériel adéquat et n’étions pas prioritaires pour le masque FFP2. Certains mettaient un genre de sac poubelle sur les cheveux pour se protéger. Nous gardions le même uniforme toute la journée, faute de matériel. La première vague était vraiment horrible, on a tous eu besoin de soutien psychologique. Le gouvernement a toujours insisté sur l’importance de l’hygiène qu'ils ont qualifiée de mesure numéro 1 dans la lutte contre le virus. Dans notre travail, on est en contact avec l'environnement des gens malades. On passe plus de temps dans la chambre contaminée qu’un médecin ou qu’un infirmier. Je croisais des patients aux urgences et puis le lendemain, j’apprenais qu’ils étaient morts du covid, c’est psychologiquement très dur. Or, des travailleurs de l’hôpital qui ne travaillent même pas en unité covid vont recevoir une prime et pas nous…  cette décision c’est nier notre investissement et notre valeur.» - Farida

« C’était une période très compliquée. Nous sommes restés sur le pont alors que de nombreux autres secteurs étaient à l’arrêt. On était un peu dans le flou car on ne connaissait pas ce virus. Le nettoyage en unité covid, c'est une quinzaine de chambre à désinfecter. Alors qu'un infirmier n'a que deux chambres à sa charge. Nous restons plus longtemps qu’eux dans une chambre et sommes en contact avec des objets que le patient contaminé a touché, le virus est dans l’air. Bien que protégé, le risque zéro n’existe pas. Nous avons pris des risques, voire davantage de risques que certains membres du personnel de l’hôpital. Nous avons été très professionnels et consciencieux pour ne pas commettre de faux-pas. Ne pas nous octroyer cette prime, c’est dégueulasse. D’autant que nos salaires ne sont pas mirobolants. » - Dondu

Pour obtenir réparation de cette injustice, plusieurs actions sont en cours. Dans les hôpitaux, mais surtout auprès du politique. Nous exigeons que les efforts de ces travailleurs, qui sont restés fidèles au poste et qui n’ont jamais démérités soient eux aussi valorisés.