Des défis à relever, une vraie concertation sociale à construire
L’industrie du béton n’échappe pas à la tendance générale : la double transition écologique et technologique bouleverse le quotidien des travailleurs. De nouvelles technologies s’immiscent dans leur travail et modifient les métiers. Plus que jamais, la formation a un rôle essentiel à jouer pour leur permettre de relever les défis de demain dans de bonnes conditions. Une priorité que semblent ignorer les employeurs du secteur.
« Dans l’industrie du béton, les employeurs font preuve d’un manque de modernité dans la concertation sociale » Sébastien Dupanloup, secrétaire fédéral FGTB en charge du secteur, ne mâche pas ses mots au moment d’introduire les travaux du congrès professionnel de l’industrie du béton en présence d’une cinquantaine de délégués.
Respecter la concertation
« Ça fait 50 ans que la convention sectorielle relative à la représentation des travailleurs n’a pas évolué. C’est le seul secteur dans le cas. Malgré les propositions concrètes des syndicats en termes de nombre de mandats, de jours de formation… les patrons refusent d’évoluer ! Et c’est le plus grand groupe du secteur qui bloque l’ensemble des négociations. On empêche les délégués de travailler et de représenter leurs collègues. C’est inacceptable. »
Les groupes importants du secteur, dont le plus grand groupe actif en Belgique, tentent systématiquement de bloquer la concertation sociale. Les dernières négociations dans le secteur ont encore démontré ces difficultés. Il a tout d’abord fallu attendre qu’un accord soit trouvé dans la construction avant que les employeurs daignent négocier et une fois les négociations entamées, toutes les demandes d’amélioration pour les travailleurs étaient remises en question.
Erik est délégué chez Schelfhout dans le Limbourg. Il abonde dans ce sens : « Les négociations au sein de notre entreprise ne sont pas problématiques en soi. Ça se complique lorsqu’on négocie au plus haut niveau, avec le CEO de la multinationale CRH à laquelle nous appartenons. Lorsque cet homme débarque dans l’entreprise, l’ambiance est directement tendue. Il est clairement là pour faire du profit et nous pose de gros problèmes. Peu importe les travailleurs, ce qui lui importe c’est la rentabilité. Heureusement, nous pouvons compter sur des travailleurs motivés et prêts à se mobiliser pour défendre leurs intérêts. »
Former les travailleurs aux nouvelles technologies
Les employeurs ont conscience des défis futurs mais ne veulent pas le faire en concertation. Dès lors, ils négligent également les compétences des travailleurs. Cela aura de graves conséquences sur l’avenir du secteur du béton. Les nouvelles technologies viennent modifier le fonctionnement du secteur, il est donc de la plus haute importance de préparer les travailleurs à ces évolutions. Cependant, depuis la crise covid, la formation des travailleurs est à la baisse alors que les investissements dans les nouvelles machines sont légion. Il est donc nécessaire de maintenir les travailleurs à niveau pour en faire bon usage.
Nemo, jeune délégué chez Ronveaux à Ciney, n’est pas fermé aux nouvelles technologies, que du contraire : « Si elles peuvent soulager la pénibilité du travail, elles sont les bienvenues. Chez
Ronveaux Ciney, on travaille encore à l’ancienne. De nouvelles machines pourraient permettre de diminuer la lourdeur de nos tâches quotidiennes et rendre le métier plus attractif. Nous devons toutefois rester vigilants en tant que délégués pour éviter que de tels investissements soient contractés aux dépens des travailleurs qui se tuent à la tâche depuis 20 ans. Il faut former les travailleurs en place à l’utilisation des nouvelles machines et non pas les remplacer par de nouveaux travailleurs. »
Relever les défis de la double transition
C’est un fait : l’industrie du béton est un secteur polluant. En tant qu’acteur essentiel dans la construction de nos infrastructures, le mode de production doit être plus durable afin de répondre aux normes environnementales européennes. On planche notamment sur la récupération du béton en fin de vie afin d’établir une économie circulaire au sein du secteur ou encore sur de nouveaux types de béton recyclé à faible impact carbone.
Des processus et nouveaux matériaux qui seront déployés dans le futur mais pour lesquels nous devrons faire preuve de vigilance quant à l’impact sur la santé des travailleurs. Aux employeurs de démontrer leur volonté de les protéger.
L’avenir du secteur est assuré mais il ne pourra pas se dessiner sans les travailleurs dont l’expérience est une véritable richesse. Les employeurs doivent en prendre conscience et enfin respecter la concertation sociale et les travailleurs du secteur.